Samuel Beckett
Digital Manuscript Project
Fin de partie / Endgame

MS-TCD-4662

MS. Pages: cover - 04r backcover
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DOODLE 1

[p. 01r]

(4662)

X.

Enfin, va-t-en. (Un temps) Qu'est-ce que tu veux. (Un temps. Plus fort) Qu'est ce que tu veux. Une banane? (Un temps. Plus fort.) Veux-tu une banane?

F.

(voix chevrotante) Mon pauvre petit! Mon pauvre petit!

X.

Approche (a tue-tête) Approche. (F. avance. xxx De même) Qu'est-ce que tu as fait de corn ton cornet?

F.

(de même) Il ne marche plus. Il est foutu (Un temps) Le méchant vilain!

X

Tu me vois?

F.

A peine, mon enfant, à peine. (Un temps) Ah Seigneur bonté divine que nous sommes peu de chose! (Un temps) Passé la quatre-vingtaine.

X.

Donne-moi un baiser. (Silence). Tu ne veux pas me donner un baiser? (Silence) Tu ne veux pas donner un baiser à ton fils? (Silence. Rêveusement) Une bonne bise. (Silence) Maman.

F.

Qu'est-ce que c'est, mon trésor? trésor?

X.

Promène-moi, veux-tu. (Un temps Silence) Un tout petit tour. (Un temps Silence) Tu ne veux pas me faire faire un petit tour? (Silence) Maman.

F.

Qu'est-ce que c'est, mon Jésus?

X.

Est-ce tu m'aimes encore un peu?

F.

Non, mon agneau, je ne veux pas te mentir.

X

Tu ne m'as jamais aimé.

F.

Je préférais de beaucoup ta petite sœur Tata. Je l'aurais tuée.

X

Tata.

F.

Oui, mon chéri pigeon, ta petite sœur Tata, c'était l'enfant martyre de la famille.

(Silence)

Tu ne veux pas donner un baiser à ton fils?

[p. 01v]

rats mécaniques

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Samuel Beckett
xxx
6 rue des Favorites
Paris 15e
Cooldrinagh Foxrock
Dublin
Cooldrinagh Foxrock
Dublin

[p. 02r] DOODLE 14

X.

Maman.

F.

Qu'est-ce que c'est, mon chaton.

X

Comment as-tu fait pour vivre si vieille?

F.

Le mouton, mon agneau, le mouton.

X.

Le mouton.

F.

Jamais un jour sans mes x douze côtelettes. Hé hé. J'aurais plutôt manqué ma prière que mes côtelettes. Tous les jours que Dieu faisait mes 12 côtelettes. Hé hé! J'aurais plûtot manqué ma prière quemes côtelettes mon gigot.

DOODLE 15

La prière et le pré-salé.

Tambour

Ah voilà que tu as un tambour à présent! Toujours tu voulais un tambour! Tout petit déjà. Je t'aurais tué. Tambour, par-ci, tambour par-là, je t'aurais tué. Et voilà, tu es arrivé. Ah c'est bien dela famille ça, une fois qu'on avait son idée on ne la lâchait plus, on mettait le temps qu'il fallait, mais on ne la lâchait plus.

X

Albert!

F.

(voix normale) Oui.

X

Enlève-moi cette putréfaction.

F

(S'éloignant, chevrotant) Hé oui.. xx xxx... ah mon pauvre enfant ... mon pauvre enfant... je t'aurais tué... (il sort)

DOODLE 16

X

Il joue de plus en plus mal. Moi aussi je joue dois jouer de + en + mal. xxx Nous sommes trop vieux. Le jeu est trop vieux, nous n'en pouvons plus, de jouer toujours les mêmes chose []vieilles vieilleries (un temps.) Nous avons beau improviser, nous n'improvisons pas, c'est encore de vieilles choses les mêmes vieilleries x de vieilles choses éprouvées. (Un temps) Nous jouons si mal que ça n'a plus l'air d'un jeu. C'est peut-être ma vraie mère, je crois peut-être que c'est ma vraie mère, je crois peut-être que tout est vrai. (Un temps) Que je suis dans la Picardie, au bord de la Manche, que j'ai une mère, une femme, un fils, un domestique, tous vivants; que nous sommes les derniers; que je vais avoir un petit chien; que cette nuit - (il s'interrompt. Un temps) Non, non, cette nuit sera comme les autres nuits, à peine plus noire, et demain, demain ne sera guère plus long qu'aujourd'hui, qu'hier.

DOODLE 17
DOODLE 18

[p. 02v]

 300
   50
15000

l'une des choses de première nécessité.

[p. 03r]

(un temps) Nous ne jouons pas si mal que ça. (un temps) Quelles conneries, heureusement que personne ne m'écoute. (Tambour. Entre F.) Tu es pâle. (un temps. X rit) Pauvre vieux, tu as failli marcher! (un temps) Non?

F.

Non.

X.

Dommage. Fatigué?

F.

Non.

X

Bon. De quoi s'agit-il.

F.

Il s'agit de tenir. ne pas mourir.

X.

Oui, mais en dehors de ça?

F.

Eh bien, il y a toujours l'affaire Bom.

X

Bom. Ah oui, cette pauvre vieille qui voulait une xxx réclame une goutte d'eau.

F.

Non, ça c'est l'affaire Bim.

X

Je baisse. (Avec colère) C'est la faute de tous ces quémandeurs. Il ne se passe pas un jour sans qu'on vienne nous importuner. (un temps) N'est-ce pas que je baisse?

F.

(gêné) Oh...

X.

Je monte peut-être.

F.

Vous avez vos des hauts et vos des bas.

X.

Alors je suis en train d'avoir un bas. (Un temps) Qu'est-ce qu'elle devient?

F.

Qui?

X

Cette vieille assoiffée?

F.

Elle est morte? .

X.

Malgré notre eau? De soif?

F.

Elle n'en a pas eu Si l'on veut.

X.

Nous n'avons pu aller Nous n'avons pas pu aller jusqu'à elle.

F.

Non.

X

Et elle n'a pas pu venir jusqu'à nous.

[p. 03v] [p. 04r]

F.

Non.

X

(avec colère) Ils attendent toujours d'être à la dernière xx extremité . Et toujours des choses de première nécessité. (Un temps) Qu'un homme dans la force de l'âge vienne frapper à la porte xx demander du caviar, on pourrait lui répondre que nous n'en avons pas qu'on n'en a pas. C'est comme ça que ça devrait se passer. (Un temps) Albert.

F

Oui.

X.

Tu es sûr que tu ne me racontes pas des histoires.

X

Elle n'est jamais venue ici? chez nous?

F.

Non.

X.

Et tu n'as jamais allé chez elle?

F.

Non.

X.

Et comment sais-tu qu'elle voulait de l'eau?

F.

Elle criait.

X.

Qu'est-ce qu'elle disait?

F.

Elle criait. De l'e Une goutte d'eau! Une goutte d'eau!

X.

Et comment sait-tu qu'elle est morte.

F.

Elle ne crie plus.

X.

Ce n'est pas forcément vers nous qu'elle criait.

F.

Il n'y a que nous.

X

Elle n'est pas forcément morte.

F.

Elle est peut-être Si, si, elle est morte.

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