Synoptic Sentence View: Sentence 2326

L'Innommable Segment 2326, version 1 (MS-HRC-SB-4-1, f. 69v)

Le silence, parler du silence, avant d'y rentrer, y ai-je été déjà, je ne sais pas, à chaque instant j'y suis, à chaque instant j'en sors, voilà que j'en parle, je savais que ça venait, j'en sors pour en parler, j'y suis tout en parlant, si c'est moi qui parle, et ce n'est pas moi, mais je fais comme c'était moi, souvent je fais comme si c'était moi, mais longuement, y ai-je été longuement, un long séjour, je ne comprends rien à la durée, je ne peux pas en parler non plus, je ne sais pas pourquoi, j'en parle bien, je dis jamais et toujours, j'ai vogue je parle des saisons et des parties du jour et de la nuit, la nuit n'a pas de parties, c'est parce qu'on dort, et les saisons doivent s'y ressembler, c'est peut-être le printemps en ce moment, voilà que je récidive, ce sont des mots qu'on m'appris, sans bien me faire voir ce qu'ils signifient, c'est comme ça que j'ai appris à raisonner, je les emploie tous, tous les mots qu'on m'a appris, des listes, ah quelle drôle de chaleur tout d'un coup, ils étaient par listes, avec des images en regard, j'ai dû en oublier, j'ai dû les mélanger, ces images sans nom que j'ai, et ces noms sans images, et ces chaises que je devrais peut-être appeler tables, enfin autrement, et ce mot homme qui n'est peut-être pas le bon pour ce que je vois en le disant ^l'entendant, et Dieu sait que je ne vois pas grand-chose ^{pour le peu que je vois,} mais un moment, une heure, et ainsi de suite, comment les illustrer, une vie, comment me faire voir ça, ici dans le noir, j'appelle ça le noir, c'est peut-être du bleu, ce sont des mots blancs, mais je les emploie, je ils viennent, tous ceux qu'on m'a montrés, tous ceux dont je me souviens, il me les faut tous, pour pouvoir continuer, ce n'est pas vrai, vingt me suffiraient, vingt fidèles, bien ancrés, bien variés, la palette y serait, je les mélangerais, je les varierais, tout ce que je ferais, si je pouvais, si je voulais, d'ailleurs ça vient, c'est peut-être comme ça que ça finira, par des cris déchirants, des murmures inarticulés, toute une onomatopée à inventer, au fur et à mesure, à improviser, tout en gémissant, je rirai, c'est comme que ça finira, par des gloussements, glouglous aïe, ha, pah, je vais m'exercer, nyam, hou, plof, pss, rien que de l'émotion, ooh, aah, c'est l' ça c'est l'amour pan, paf, les coups, na, toc, quoi encore, aah, ooh, c'est ça c'est l'amour, assez, c'est fatigant , hi hi hi hi, ça c'est les côtes, ^{les côtes de Démocrite, non, de l'autre, en fin de compte,} c'est la fin, c'est le silence, le silence, que dire du silence, le vrai, pas celui où je baigne, jusqu'à la bouche, jusqu'à l'oreille, qui me recouvre, qui me découvre, qui respire avec moi, comme un chat avec une souris, le vrai, celui des noyés, je me suis noyé, plusieurs fois, ce n'était pas moi, je me suis asphyxié, je me suis mis le feu, je me suis cogné sur la tête avec du bois et du fer, ce n'était pas moi, ^{il n'y avait pas de tête, il n'y avait pas de fer,} je ne me suis rien fait, je n'ai rien fait à personne, personne ne m'a rien fait, il n'y a personne, j'ai cherché, il n'y a que moi, non plus, moi non plus, j'ai cherché partout, il doit y avoir quelqu'un, cette voix doit appartenir à quelqu'un, je veux bien, je veux tout ce qu'elle veut, je suis elle, je l'ai dit, elle le dit, de temps en temps elle le dit, puis elle dit que non, je veux bien, je veux qu'elle se taise, elle veut se taire, elle ne peut pas, elle se tait un instant, puis puis elle reprend, ce n'est pas le vrai silence, elle dit que ce n'est pàs là le vrai silence, que dire du vrai silence, je ne sais pas, qu'il a que je ne le connais pas, qu'il n'y en a pas, qu'il y en a peut-être, oui, qu'il y en a peut-être, je ne le saurai jamais.

L'Innommable Segment 2326, version 2 (Minuit 1953, p. 247)

Le silence, parler du silence, avant d'y rentrer, y ai-je été déjà, je ne sais pas, à chaque instant j'y suis, à chaque instant j'en sors, voilà que j'en parle, je savais que ça venait, j'en sors pour parler, j'y suis tout en parlant, si c'est moi, qui parle, et ce n'est pas moi, je fais comme si c'était moi, souvent je fais comme si c'était moi, mais longuement, y ai-je été longuement, un long séjour, je ne comprends rien à la durée, je ne peux pas en parler, j'en parle bien, je dis jamais et toujours, je parle des saisons et des parties du jour et de la nuit, la nuit n'a pas de parties, c'est parce qu'on dort, les saisons doivent s'y ressembler, c'est peut-être le printemps en ce moment, ce sont des mots qu'on m'a appris, sans bien m'en faire voir le sens, c'est comme ça que j'ai appris à raisonner, je les emploie tous, tous les mots qu'on m'a montrés, c'étaient des listes, ah quelle drôle de chaleur tout d'un coup, ils étaient par listes, avec des images en regard, j'ai dû en oublier, j'ai dû les mélanger, ces images sans nom que j'ai, ces noms sans images, ces fenêtres que je ferais peut-être mieux d'appeler portes, enfin autrement, et ce mot homme qui n'est peut-être pas le bon pour ce que je vois en l'entendant, mais un instant, une heure, et ainsi de suite, comment les représenter, une vie, comment me faire voir ça, ici, dans le noir, j'appelle ça le noir, c'est peut-être de l'azur, ce sont des mots blancs, mais je m'en sers, ils viennent, tous ceux qu'on m'a fait voir, tous ceux dont je me souviens, il me les faut tous, pour pouvoir continuer, ce n'est pas vrai, vingt suffiraient, bien fidèles, bien ancrés, bien variés, la palette y serait, je les mélangerais, je les varierais, la gamme y serait, toutes les choses que je ferais, si je pouvais, si je voulais, d'ailleurs ça vient, c'est comme ça que ça finira, par des cris déchirants, des murmures inarticulés, à inventer, au fur et à mesure, à improviser, tout en gémissant, je rirai, c'est comme ça que ça finira, par des gloussements, glouglou, aïe, ha, pah, je vais m'exercer, nyam, hou, plof, pss, rien que de l'émotion, pan, paf, les coups, na, toc, quoi encore, aah, ooh, ça c'est l'amour, assez, c'est fatiguant, hi, hi, ça c'est les côtes, de Démocrite, non, de l'autre, en fin de compte, c'est la fin, la fin du compte, c'est le silence, quelques glouglous sur le silence, le vrai, pas celui où je macère, jusqu'à la bouche, jusqu'à l'oreille, qui me recouvre, qui me découvre, qui respire avec moi, comme un chat avec une souris, le vrai, celui des noyés, je me suis noyé, plusieurs fois, ce n'était pas moi, je me suis asphyxié, je me suis mis le feu, je me suis cogné sur la tête avec du bois et du fer, ce n'était pas moi, il n'y avait pas de tête, il n'y avait pas de fer, je ne me suis rien fait, je n'ai rien fait à personne, personne ne m'a rien fait, il n'y a personne, il n'y a pas de bois, j'ai cherché, il n'y a que moi, non plus, moi non plus, j'ai cherché partout, il doit y avoir quelqu'un, cette voix doit appartenir à quelqu'un, je veux bien, je veux tout ce qu'elle veut, je suis elle, je l'ai dit, elle le dit, de temps en temps elle le dit, puis elle dit que non, je veux bien, je veux qu'elle se taise, elle veut se taire, elle ne peut pas, elle se tait un instant, puis elle reprend, ce n'est pas le vrai silence, elle dit que ce n'est pas le vrai silence, que dire du vrai silence, je ne sais pas, que je ne le connais pas, qu'il n'y en a pas, qu'il y en a peut-être, oui, qu'il y en a peut-être, quelque part, je ne le saurai jamais.

The Unnamable Segment 2326, version 3 (MS-HRC-SB-5-9-3, f. 44r)

The silence, speak of the silence, before going into it, have I been there already, I don't know, at every instant I am there, there I am speaking of it, I knew it would come, I emerge from it to speak of it, I am in it while I speak of it, if it's I who speak, and it is not, I act as if it were, often I act as if it were I, but at length, was I ever there at length, a long stay, I understand nothing about duration, I can't speak of it, I speak of it all right, I say never and always, I speak of the seasons and the different parts of the day and of the night, the night has no parts, that's because you are asleep, the seasons must resemble one another, perhaps it's springtime now, that's all words they taught me, without making their meaning clear to me, that's how I learnt how to reason, I use them all, all the words they showed me, they were on lists there were lists of them, ah what a strange glow all of a sudden, they were on lists, with images opposite, I must have forgotten some, I must have mixed them up, these nameless images I have, these imageless names, these windows that I would perhaps be better advised to call doors, at least by some other name, and this word man which is perhaps not the right one for the thing I see when I hear it, but an instant, an hour, and so on, how can they be represented, a life, how could they make that clear to me, here, in the dark, I call that the dark, perhaps it's blue azure, they are blank words, but I use them, they come, all those they showed me, all those I remember, I need them all, to be able to go on, it's a lie, twenty would do, trusty trusty and unforgettable and nice nicely varied tried and trusty, unforgettable, nicely varied, that would be palette enough, I'd mix them, I'd vary them, that would be gamut enough, all the things I'd do, if I could, if I wished, and if I could wish, and so I will, I feel it coming, that's how it will end, with heart rending cries, inarticulate murmurs, to be invented, as I go along, improvised, as I groan along, I'll laugh, that's how it will end, with chuckling, chuck chuck, ow, ha, pah, I'll practise, nyum, hoo, plop, psss pss, nothing but emotion, bing, bang, that's blows, ow, ay, what else, ooh, aah, that's love, enough, it's tiring, hee hee, that's the ribs, of Democritus, no, the other, in the end, it's the end, the ending end, it's the silence, a few gurgles on the silence, the true ^real x silence, not the one where I macerate, up to the mouth, up to the ear, which covers, uncovers me, breathes with me, like a cat with a mouse, that of the drowned, I've drowned, more than once, it wasn't it, I've I, I've choked myself, set fire to me, beaten on my head with wood and iron, it wasn't I, there was no head, no iron, I didn't do anything to myself, I didn't do anything to anybody, anyone, no one did anything to me, there is no one, there is no wood, I've looked, there is only I, no, not I either, I've looked everywhere, there must be someone, this voice must belong to someone, I have no objection, I I'm quite xxx, what it wills I will, I am that's all right with me, what it wants I want, I am it, I've said so, it says so, from time to time it says so, then it says not, that's all right with me, I want it to go silent, it wants to go silent, it can't, it does for a second, then it starts again, that's not true the real silence, it says that's not the real silence, what's to be said what can be said of the real silence, I don't know, that I don't know what it is, that there's no such thing, that perhaps there is such a thing, yes, that perhaps there is, somewhere, I'll never know.

The Unnamable Segment 2326, version 4 (MS-HRC-SB-5-10, f. 138r)

The silence, speak of the silence before going into it, have I been there al^ready, I don't know, at every instant I am there, there I am speaking of it, I knew it would come, I emerge from it to speak of it, I am in it while I speak of it, if it's I who speak, and it's not, I act as if it were, often I act as if it were I, but at lenght, was I ever there at length, a long stay, I understand nothing about duration, I can't speak of it, oh I know I speak of it, I say never and always, I speak of the four seasons and of the differ^rents pa^rts of the day and of the night, the night has no pa^rts, that's because you are asleep, the seasons must resemble one another, ^{be very similar,} perhaps it's springtime now, that's allw words they taught me, without making their meaning clear to me, that's how I know ^learnt how to reason reason, I used them all, all the words they showed me, there were lists of them, ah what a ^the strange glow all of a sudden, they were on lists, with images opposite, I must have forgotten them, I must have mixed them up, these nameless images I have, these imageless names, these windows that I should perhaps rather call doors, at least by some other name, and this word man which is perhaps not the right one for the thing I see when I hear it, but an instant, an hour, and so on, how can they be respresented, a life, how could they make that clear to me, here, in the dark, I call that the dark, perhaps it's azure, they are blank words, but I use them, they come ^{keep coming}, all those they showed me, all those I remember;, I need them all, to be able to go on, it's a lie, twenty ^{a score} would do, tried and trusty, unforgettable, nicely varied, that would be palette enough, I'd mix them, I'd vary them, that would be gamut enough, all the things I'd do if I could, if I wished, if I could wish, no need to wish, that's how it will end, with ⁱⁿ heartrending cries, inarticulate murmurs, to be inc^vented, as I go along, improvised, as I f^groan along, I'll laugh, that's how it will end, in a chuckle, chuck chuck, ow, ha, pah, I'l;^l practise, nyum, hoo, plop, pss, nothing but emotion, ugh, hey, what else, ooh, bing, bang, that's blows, uh^gh, hey ^pooh, what else, ooh, aah, that's love, enough, it's tiring, heehee, that's the ^Abderite's ribs, of Democritus ^{the Abderite}, no, theo other,^'s, in the end, it's the end, the ending end, it's the silence, a few gurgles on the sie^lence, the real silence, not the one where I macerate up to the mouth, up to the ear, that covers me, uncovers me, br breathes with me, like a cat with a mouse, that of the drowned, i^I've ^{have [⁁] I've} drowned, more than once, it wasn't I, I've ^have choked ^suffocated, set fire to me, beaten ^thumped on my head with wood and stone ^iron, it wasn't I, there was no head, no iron, I didn't do anything to me, I didn't do anything to anyone, no one did anything to me, there is no one, no wood, I've looked, no one but me, no, not me either, I've looked everywhere, there must be someone, the voice must bem^long to someone, that's all right with me, what it wants I want, I am it, I've said so, it says so, from time to time it says so, then it says not, that's all right with me, I want it to go silent, it wants to go silent, it can't, it does for a second, then it starts again, that's not the reals silence, it says that's not the real silence, what can be said of the real silence, I don't know, that I don't know what it is, that there's ^is no such thing, that perhaps there is such a thing, yes, that perhaps there is, somewhere;, I'll never know.

The Unnamable Segment 2326, version 5 (MS-WU-MSS008-3-71, f. 134r)

The silence, speak of the silence before going into it, was I there already, I don't know, at every instant I'm there, listen to me speaking of it, I knew it would come, I emerge from it to speak of it, I stay in it to speak of it, if it's I who speak, and it's not, I act as if it were, sometimes I act as if it were, but at length, was I ever there at length, a long stay, I understand nothing about duration, I can't speak of it, oh I know I speak of it, I say never and ever, I speak of the four seasons and the different parts of the day and night, the night has no parts, that's because you are xl asleep, the seasons mj^ust be very similar, perhaps it's springtime now, that's all words they taught me, without making their meaning clear to me, that's how I learnt to reason, I use them all, all the words they showed me, there were columns of them, oh the strange glow all of a sudden, they were on lists, with il^mages opposite, I must have forgotten them, I must have mixed them up, these nameless images I have, these imageless names, these windows I should perhaps rather call doors, at least by some other name, and this word man which is perhaps not the right one for the thing I see when I hear it, but an instant, an hour, and so on, how can they be represented, a life, how could that be made clear to me clear to me, here, in the dark, I call that the dark, perhaps it's azure, blank words, but I use them, they keep coming back, all those they showed me, all those I remember, I need them all, to be able to go on, it's a lie, a score would be plenty, tried and trusty, unforgettable, nicely varied, that would be palette enough, I'd mix them, I'd vary them, that would be gamut enough, all the things I'd do if I could, if I wished, if I could wish, no need to wish, that's how it will end, in heartrending cries, inarticulate murmurs, to be invented, as I go along, improvised, as I groan along, I'll laugh, taht's how it will end, in a chuckle, chuck chuk chuck, ow, ha, pa, I'll practise, nyum, hoo, plop, psss, nothing but emp^otion, bing bang, that's blows, ugh, pooh, what else, oooh, aaah, that's love, enough, it's tiring, hee hee, that's the Abderite, no, the other, in the end, it's the end, the ending end, it's the silence, a few gurgles on the silence, the real silence, not theo the one where I macerate up to the mouth, up to the ear, that covers me, uncovers me, bf^reathes with me, like a cat with a mouse, that of the drowned, I've drowned, more than once, it wasn'tx wasn't I, suffocated, set fire to me, thumped on my head with wood and iron, it wasn't I, there was no head, no wood, no iron, I didn't do anything to me, I didn't do anything to anybody ^one, no one did anything to me, there is no one, I've looked, no one but me, no, not me either, I've looked everywhere, there must be someone, the voice mj^ust belong to someone, I've no objection, what it wants I want, I am it, I've said so, it says so, from time to time it says so, then it says not, I've no objection, I want it to go silent, it wants to go silent, it can't, it does for a second, then it starts again, that's not the real silence, it says that's not the real silence, what can be said of the real silence, I don't know, that I don't know what it is, that there is no such thing, that perhaps there is such a thing, yes, that perhaps there is, somewhere, I'll never know.

The Unnamable Segment 2326, version 6 (Grove Press 1958, p. 169)

The silence, speak of the silence before going into it, was I there already, I don't know, at every instant I'm there, listen to me speaking of it, I knew it would come, I emerge from it to speak of it, I stay in it to speak of it, if it's I who speak, and it's not, I act as if it were, sometimes I act as if it were, but at length, was I ever there at length, a long stay, I understand nothing about duration, I can't speak of it, oh I know I speak of it, I say never and ever, I speak of the four seasons and the different parts of the day and night, the night has no parts, that's because you are asleep, the seasons must be very similar, perhaps it's springtime now, that's all words they taught me, without making their meaning clear to me, that's how I learnt to reason, I use them all, all the words they showed me, there were columns of them, oh the strange glow all of a sudden, they were on lists, with images opposite, I must have forgotten them, I must have mixed them up, these nameless images I have, these imageless names, these windows I should perhaps rather call doors, at least by some other name, and this word man which is perhaps not the right one for the thing I see when I hear it, but an instant, an hour, and so on, how can they be represented, a life, how could that be made clear to me, here, in the dark, I call that the dark, perhaps it's azure, blank words, but I use them, they keep coming back, all those they showed me, all those I remember, I need them all, to be able to go on, it's a lie, a score would be plenty, tried and trusty, unforgettable, nicely varied, that would be palette enough, I'd mix them, I'd vary them, that would be gamut enough, all the things I'd do if I could, if I wished, if I could wish, no need to wish, that's how it will end, in heart-rending cries, inarticulate murmurs, to be invented, as I go along, improvised, as I groan along, I'll laugh, that's how it will end, in a chuckle, chuck chuck, ow, ha, pa, I'll practise, nyum, hoo, plop, psss, nothing but emotion, bing, bang, that's blows, ugh, pooh, what else, oooh, aaah, that's love, enough, it's tiring, hee hee, that's the Abderite, no, the other, in the end, it's the end, the ending end, it's the silence, a few gurgles on the silence, the real silence, not the one where I macerate up to the mouth, up to the ear, that covers me, uncovers me, breathes with me, like a cat with a mouse, that of the drowned, I've drowned, more than once, it wasn't I, suffocated, set fire to me, thumped on my head with wood and iron, it wasn't I, there was no head, no wood, no iron, I didn't do anything to me, I didn't do anything to anyone, no one did anything to me, there is no one, I've looked, no one but me, no, not me either, I've looked everywhere, there must be someone, the voice must belong to someone, I've no objection, what it wants I want, I am it, I've said so, it says so, from time to time it says so, then it says not, I've no objection, I want it to go silent, it wants to go silent, it can't, it does for a second, then it starts again, that's not the real silence, it says that's not the real silence, what can be said of the real silence, I don't know, that I don't know what it is, that there is no such thing, that perhaps there is such a thing, yes, that perhaps there is, somewhere, I'll never know.

L'Innommable Segment 2326, version 7 (Minuit 1971, p. 201)

Le silence, parler du silence, avant d'y rentrer, y ai-je été déjà, je ne sais pas, à chaque instant j'y suis, à chaque instant j'en sors, voilà que j'en parle, je savais que ça venait, j'en sors pour parler, j'y suis tout en parlant, si c'est moi qui parle, et ce n'est pas moi, je fais comme si c'était moi, souvent je fais comme si c'était moi, mais longuement, y ai-je été longuement, un long séjour, je ne comprends rien à la durée, je ne peux pas en parler, j'en parle bien, je dis jamais et toujours, je parle des saisons et des parties du jour et de la nuit, la nuit n'a pas de parties, c'est parce qu'on dort, les saisons doivent s'y ressembler, c'est peut-être le printemps en ce moment, ce sont des mots qu'on m'a appris, sans bien m'en faire voir le sens, c'est comme ça que j'ai appris à raisonner, je les emploie tous, tous les mots qu'on m'a montrés, c'étaient des listes, ah quelle drôle de chaleur tout d'un coup, ils étaient par listes, avec des images en regard, j'ai dû en oublier, j'ai dû les mélanger, ces images sans nom que j'ai, ces noms sans images, ces fenêtres que je ferais peut-être mieux d'appeler portes, enfin autrement, et ce mot homme qui n'est peut-être pas le bon pour ce que je vois en l'entendant, mais un instant, une heure, et ainsi de suite, comment les représenter, une vie, comment me faire voir ça, ici, dans le noir, j'appelle ça le noir, c'est peut-être de l'azur, ce sont des mots blancs, mais je m'en sers, ils viennent, tous ceux qu'on m'a fait voir, tous ceux dont je me souviens, il me les faut tous, pour pouvoir continuer, ce n'est pas vrai, vingt suffiraient, bien fidèles, bien ancrés, bien variés, la palette y serait, je les mélangerais, je les varierais, la gamme y serait, toutes les choses que je ferais, si je pouvais, si je voulais, d'ailleurs ça vient, c'est comme ça que ça finira, par des cris déchirants, des murmures inarticulés, à inventer, au fur et à mesure, à improviser, tout en gémissant, je rirai, c'est comme ça que ça finira, par des gloussements, glouglou, aïe, ha, pah, je vais m'exercer, nyam, hou, plof, pss, rien que de l'émotion, pan, paf, les coups, na, toc, quoi encore, aah, ooh, ça c'est l'amour, assez, c'est fatiguant, hi, hi, ça c'est les côtes, de Démocrite, non, de l'autre, en fin de compte, c'est la fin, la fin du compte, c'est le silence, quelques glouglous sur le silence, le vrai, pas celui où je macère, jusqu'à la bouche, jusqu'à l'oreille, qui me recouvre, qui me découvre, qui respire avec moi, comme un chat avec une souris, le vrai, celui des noyés, je me suis noyé, plusieurs fois, ce n'était pas moi, je me suis asphyxié, je me suis mis le feu, je me suis cogné sur la tête avec du bois et du fer, ce n'était pas moi, il n'y avait pas de tête, il n'y avait pas de fer, je ne me suis rien fait, je n'ai rien fait à personne, personne ne m'a rien fait, il n'y a personne, il n'y a pas de bois, j'ai cherché, il n'y a que moi, non plus, moi non plus, j'ai cherché partout, il doit y avoir quelqu'un, cette voix doit appartenir à quelqu'un, je veux bien, je veux tout ce qu'elle veut, je suis elle, je l'ai dit, elle le dit, de temps en temps elle le dit, puis elle dit que non, je veux bien, je veux qu'elle se taise, elle veut se taire, elle ne peut pas, elle se tait un instant, puis elle reprend, ce n'est pas le vrai silence, elle dit que ce n'est pas le vrai silence, que dire du vrai silence, je ne sais pas, que je ne le connais pas, qu'il n'y en a pas, qu'il y en a peut-être, oui, qu'il y en a peut-être, quelque part, je ne le saurai jamais.