Digital Manuscript ProjectMalone meurt / Malone Dies

[1481] [⁁] Et il en est peut-être là de son instant où
vivre est errer seul vivant au fond d'un
instant sans bornes, où la lumière ne
varie pas et les épaves se ressemblent.
[1482] Les yeux à peine plus bleus qu'un blanc
d'œuf fixent l'espacent [for l\'espace] devant eux,
qui serait alors le plein calme éternellement
des abîmes.
[1483] Mais de loin en loin ils se
referment, avec la douce soudaineté des
chairs qui se serrent, souvent sans colère,
et se referment sur elles-mêmes.
[1484] Alors on voit
les vieilles paupières rouges et fripées qui semblent
avoir du mal à se rejoindre, car il y en a 4,
2 pour chaque lachryme.
[1485] Et c'est peut-être
alors qu'il voit le ciel du vieux rêve, des
croisières et de la terre aussi, et les spasmes des
vagues dont nulle ne bouge sans que toutes
les autres en bougent d'autant, et le mouvement
si différent des hommes par exemple, qui ne
sont pas attachés les uns aux autres mais libres
d'aller et venir, chacun à sa guise.
[1486] Et ils ne
s'en font pas faute et vont et viennent, dans le
fracas de crécelle de leurs déclics de grands
articulés, chacun de son côté.
[1487] Et quand il y
en a un qui meurt les autres continuent,
comme si de rien n'était.
de terre par exemple, surtout au
moment de leur maturité,
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Malone meurt / Malone Dies © 2017 Samuel Beckett Digital Manuscript Project.
Editors: Dirk Van Hulle, Pim Verhulst and Vincent Neyt