Digital Manuscript ProjectMalone meurt / Malone Dies

[1083] laisser impressionner par les plaies de vieillesse.
[1084] C'est l'œil qui compte.
[1085] Un assistant lui avait
dit, Il a déjà fait dix milles, il
crèvera avant d'arriver chez toi.
[1086] Je comptais en tirer 6 mois, dit Louis,
j'en ai tiré deux ans.
[1087] Tout en parlant
il surveillait son fils.
[1087|001] Sapo aussi
regardait par la fenêtre.
[1088] Ils étaient là,
en face l'un de l'autre, dans l'obscurité,
l'un parlant, l'autre écoutant, sans
se regarder, et loin, l'un de
ce qu'il disait, l'autre de ce qu'il
entendait, et loin l'un de l'autre.
[1095] Ils travaillèrent
un bon moment ensemble, [ADDITION]Addition on page
14vsans s'occuper l'un de l'autre, puis
le fils lâcha sa pelle, se détourna
et s'en alla lentement, d'un
seul mouvement égal et
arrondi, passant sans heurt
aucun de l'effort, en place à la
flânerie comme à sa seule suite
possible de celui-là.
[1095|001] Le père ne sembla pas y
faire attention, et continua
à combler le trou qu'il avait
creusé.
[1096] Le matin même.
Le mulet ne se voyait déjà plus.
[1097] La surface, qu'il avait passé sa vie à
fouler, ne le verrait plus, peinant
devant la charrue, devant la
charrette.
[1098] Et le gros Louis allait bientôt
pouvoir labourer, à cet endroit même,
avec un autre mulet, ou avec un vieux
cheval, qu'il aurait acheté à
l'abattoir chevalin, qu'on appelle
aussi l'equarroir , sans que le soc
retourne les chairs fétides
ni s'émousse aux grands
os qu'elles avaient revêtus.
- Segments
Malone meurt / Malone Dies © 2017 Samuel Beckett Digital Manuscript Project.
Editors: Dirk Van Hulle, Pim Verhulst and Vincent Neyt