Digital Manuscript ProjectMalone meurt / Malone Dies

[1373] j'ai mangé les autres, c'est
comme toujours, par besoin d'amour,
d'homuncule, je ne peux pas m'arrêter.
[1374] Et pourtant il me semble que je suis
né et que j'ai reçu longuement et
rencontré Jackson et erré dans les villes,
les bois et les déserts et que j'ai été
longuement au bord
des mers et pleuré presque en voyant
les îles et péninsules où venaient briller
la nuit les petites lumières jaunes et brèves
[1374]
des hommes et puis toute la nuit
les grands feux blancs ou
aux vives couleurs
visibles à dix milles, qui venaient
dans les cavernes où j'étais heureux,
couché sur le sable à l'abri des
rochers dans l'odeur des algues et
de la roche humide au bruit du
[1374]
vent des vagues dont
l'écume jaillissait jusqu'à moi ou
soupirant sur la grève et griffant
à peine le galet, non, pas heureux,
je n'ai jamais été heureux, mais
souhaitant que la nuit ne finisse
jamais ni par conséquent le jour
revienne qui fait dire aux hommes,
La vie passe, il faut en profiter.
[1375] D'ailleurs peu importe que je sois né ou
non, que j'aie vécu ou non, que je
sois mort ou seulement
en plein essor, je ferai comme
j'ai toujours fait, dans l'ignorance
de ce que je fais, de qui je suis, d'où
je suis, de si je suis.
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Malone meurt / Malone Dies © 2017 Samuel Beckett Digital Manuscript Project.
Editors: Dirk Van Hulle, Pim Verhulst and Vincent Neyt